L'arbre ombilical : La perception prénatale vue par Tomatis

Représentation numérique d'un fœtus avec un cordon ombilical lumineux, symbolisant les connexions sensorielles prénatales de Tomatis, sur un fond sombre.


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L'œuvre Neuf Mois au Paradis d'Alfred Tomatis présente une perspective unique sur la vie prénatale, en positionnant l'utérus comme un environnement dynamique où les expériences sensorielles façonnent le développement humain. Le cordon ombilical, qui n'est pas seulement une ligne de vie biologique mais un objet complexe de perception et de symbolisme, est un thème central de son œuvre. Ce billet examine les observations de Tomatis sur le rôle tactile du cordon, son impact psychologique et sa transformation en l'image universelle de l'arbre dans les dessins d'enfants, offrant un aperçu de la manière dont ces impressions précoces peuvent influencer la vie future.

Le cordon ombilical : Une présence silencieuse et active

Tomatis souligne un détail anatomique essentiel : le cordon ombilical ne contient pas de terminaisons nerveuses. Composé d'un tube gélatineux avec des vaisseaux et des artères, il reste indolore, ce qui permet de le sectionner facilement à la naissance. Malgré cela, le fœtus le perçoit comme une entité distincte, un "corps étranger" dans l'utérus. À partir du quatrième mois, lorsque la perception tactile émerge, le fœtus interagit avec le cordon, en le tirant et en le tordant avec ses petits doigts. Ce cordon sert d'attache, permettant le mouvement dans l'espace utérin, un ancrage sûr qui favorise l'exploration.

Cependant, cette relation est ambivalente. Le cordon peut se tordre ou se nouer, créant des sensations de constriction ou d'étranglement. Tomatis le compare au "serpent de la légende", un compagnon à double nature, à la fois ludique et potentiellement dangereux. Ces premières rencontres avec l'inconfort ou la peur, déclenchées par le comportement imprévisible du cordon, marquent les premières expériences émotionnelles du fœtus. Tomatis suggère que ces moments sont si intenses qu'ils laissent une empreinte durable, formant les premiers drames de l'existence qui résonnent longtemps après la naissance.

Éveil tactile et formation de la mémoire

L'apparition de la perception tactile vers le quatrième mois ouvre un nouveau domaine au fœtus. Il explore son corps, notant les zones qui réagissent et celles qui restent en sommeil, dans un processus graduel de prise de conscience de soi. Ces sensations sont vives, affirme Tomatis, et constituent une "mémoire considérable" qui persiste au-delà de l'utérus. Cette mémoire s'exprime de manière surprenante dans les dessins des jeunes enfants, où l'arbre apparaît comme un motif récurrent.

Partout dans le monde, que ce soit en Europe, en Asie, dans les déserts d'Afrique ou dans les étendues glacées du Groenland, les enfants dessinent universellement des arbres parmi leurs premières œuvres d'art. Les adultes y voient des troncs, des branches et des fruits, mais Tomatis les interprète comme des projections de la vie prénatale. Le "tronc" représente le cordon ombilical, un long filament qui ancre le fœtus. Les "racines" symbolisent le placenta, qui enracine la structure dans les profondeurs de l'utérus. Les "branches" ou la "couronne" - souvent représentées par des fleurs ou des pommes - reflètent le corps du fœtus, les mains s'épanouissant comme des pétales et la tête comme un fruit. Cet arbre n'est donc pas un objet naturel mais une mémoire sensorielle, guidée par les premières explorations tactiles du fœtus.

Liens mythiques et symboliques

Tomatis établit des parallèles entre cette imagerie arborescente et les mythes anciens, en particulier les arbres judéo-chrétiens de la vie et de la connaissance. L'arbre de vie, qu'il est interdit de toucher même au paradis, rappelle le rôle vital du cordon ombilical : s'il est endommagé, la vie s'arrête, tout comme la circulation sanguine. L'arbre de la connaissance, où Adam cueille la "pomme" (un terme dérivé du persan pour "fruit", commun à toutes les langues), s'aligne sur le rôle du cordon en tant que source de prise de conscience par le toucher. Tomatis souligne notamment qu'un cordon contraignant appuie sur la "pomme d'Adam", reliant ainsi de manière frappante le physique et le mythologique.

Il présente également le cordon comme un serpent - d'une intelligence biblique, mais sourd sur terre, à l'écoute seulement dans l'eau, une figure qui "a appris à l'homme à ne pas écouter". Cette surdité symbolise un refus de la vérité, ajoutant une couche d'intrigue à son influence prénatale. Dans les dessins d'enfants, l'arbre évolue : la couronne s'élargit en une figure humaine, s'étire horizontalement en une croix - l'expansion la plus complète de ce symbole utérin. Tomatis met en garde contre une interprétation mystique de cette évolution, qui reflète plutôt l'instinct de l'enfant à relier son monde utérin au cosmos, une excroissance naturelle de la perception prénatale.

Évolution de l'espace et du symbole

L'arbre n'est pas une image statique. Au fil des carnets de croquis des enfants, il grandit - les couronnes s'élargissent, les formes se transforment en figures ou en croix, symbolisant l'expansion de l'utérus. Dans d'autres dessins, l'utérus lui-même se transforme en maisons, en grottes ou en vastes domaines, suggérant une continuité de la conscience spatiale. Le cordon (tronc), le placenta (racines) et le fœtus (couronne) évoluent vers les abris de la vie future. La croix, dans sa plus grande largeur, incarne la portée maximale de cet archétype, enraciné dans la "nuit" du placenta.

Cette évolution souligne le point de vue de Tomatis selon lequel les expériences prénatales ne s'arrêtent pas à la naissance - elles s'adaptent. L'engagement tactile du fœtus avec le cordon et le corps construit une carte sensorielle, exprimée dans l'art et reflétée dans les espaces créés par les humains. Les "fruits" de l'arbre - mains ou tête - représentent les centres moteurs et perceptifs, bien que leur "comestibilité" reste une métaphore, ouverte à l'interprétation. Les observateurs sont considérés comme des "spectateurs attentifs", qui assistent au déroulement d'un musée naturel de symboles.

Le son comme déclencheur

L'approche de Tomatis s'est appuyée sur le son pour débloquer ces souvenirs. Il a utilisé des enregistrements filtrés - la musique de Mozart et les voix maternelles lorsqu'elles étaient disponibles, traitées avec un filtre passe-haut jusqu'à 10 000 Hz pour conserver les harmoniques les plus élevées - imitant l'environnement auditif de l'utérus. C'est ce qui a déclenché les dessins d'arbres, indiquant que le son peut réveiller les sensations prénatales. Les paysages sonores NeuraSonic , lancés en 2011 après l'ère Tomatis, s'appuient sur ce principe, en utilisant des techniques audio avancées pour explorer ces mêmes échos, prolongeant ainsi l'héritage de Tomatis dans des contextes modernes.

Un héritage prénatal

Neuf Mois au Paradis révèle l'utérus comme un espace de formation où le cordon ombilical façonne la perception et la mémoire. D'un jouet tactile à une énigme serpentine, il sème l'archétype de l'arbre - tronc, racines, couronne - reliant l'expérience personnelle aux mythes universels. Ces dessins, qui évoluent de l'utérus au monde, suggèrent que nos abris et nos symboles remontent à ces premiers jours. Tomatis invite à repenser les origines de l'homme, non pas comme un point de départ vierge, mais comme une base sensorielle qui se ramifie dans les espaces et les histoires que nous vivons.

Référence : Tomatis, Alfred. Neuf Mois au Paradis : Histoire Prénatale. Disponible à l'adresse : https://www.amazon.com/Neuf-mois-paradis-Histoire-pr%C3%A9natale/dp/B003Z0POV2.

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